Qu'est-ce qu'un régime politique ?
- Rudius Officiel
- 28 juil. 2021
- 5 min de lecture
Démocratie, autoritarisme, totalitarisme, ... Retour sur ce qu'est un régime politique, de ses composantes à sa légitimité et comment les idéntifier.
Contrairement à ce que l’on pourrait penser, il n’est pas si évident qu’il n’y paraît de distinguer les régimes politiques en fonction de certaines apparences. Chaque régime à ses nuances et subtilités qui peuvent les faire passer pour ce qu’ils ne sont pas. Ainsi certains qualifieront Vladimir Poutine de dictateur alors que d’autres le démentiront, de même pour Viktor Orban en Hongrie, de Erdogan en Turquie, mais aussi, pourquoi pas, d’Emmanuel Macron que certains qualifient de monarque présidentiel ou accusent d’avoir installé une dictature sanitaire. Nous allons voir dans cette prochaine série de vidéos quelles sont les nuances et les particularités des différents régimes politiques et comment les reconnaitre.
Ce qui différencie les sciences sociales des sciences dures c’est qu’on peut être certain avec les sciences sociales qu’on aura des dizaines de définitions différentes pour un seul concept pourtant fondamental. En réalité, plus un sujet est basique et utilisé, plus il y aura de définitions de celui-ci. Et le concept de régime politique ne fait pas exception.
Ici nous allons retenir la définition du politologue français Jean-Louis Quermonne (Les régimes politiques occidentaux, 2006), qui est selon nous la plus précise et complète. Pour Quermonne, un régime politique c’est :
« L’ensemble des éléments d’ordre idéologique, institutionnel et sociologique qui concourent à former le gouvernement d’un pays donné pendant une période déterminée »
Ces éléments sont très nombreux et variés mais Quermonne en privilégie quatre qu’il juge essentiels.
Ce qui va constituer un régime politique c’est en premier lieu la structure de ses institutions, leur organisation, c’est-à-dire savoir si l’État va être monarchique, dirigé par un Prince, un Roi ou un Empereur, présidentiel ou parlementaire, centré autour d’une ou plusieurs assemblées de représentants politiques. Il existe évidement des systèmes intermédiaires avec les monarchies parlementaires, ou les régimes semi-présidentiels.
Le deuxième point concerne le système de partis, c’est-à-dire l’organisation des partis politiques au sein d’un pays. Ici aussi on trouve plusieurs types différents, avec le plus simple : le parti unique, où un seul parti occupe la scène politique comme ce fut le cas avec le parti fasciste dans l’Italie de Mussolini ou aujourd’hui dans la République populaire de Chine avec le Parti Communiste. Vient ensuite le bipartisme comme aux États-Unis où l’espace politique est occupé par deux partis principaux, dans ce cas-ci les Démocrates et les Républicains. Enfin on a le multipartisme avec plus de deux partis qui dominent les élections comme en Belgique, en Suisse ou en Allemagne.
La troisième composante s’attarde sur la forme et le rôle de l’État. La forme, c’est savoir si le pays va être composé d’États ou de régions différentes qui disposent de leurs propres prérogatives comme c’est le cas aux États-Unis ou en Belgique. C’est ce qu’on appelle un État fédéral. Si le pays ne dispose pas de différentes régions ou si la Constitution ne leur octroie aucun pouvoir ou autonomie, il s’agira alors d’un État unitaire comme c’est le cas en France ou au Royaume-Uni.
Le rôle de l’État quant à lui concerne les sujets dans lesquels celui-ci est compétent, comme l’économie, l’énergie ou les transports. S’il assure une sécurité sociale ou non, ou encore s’il respecte la prédominance du droit sur la politique, ce qu’on appelle le fameux État de droit.
Enfin, la dernière composante concerne la légitimité sur laquelle l’État s’appuie pour gouverner.
Légitimer son régime
Qu ’on soit une dictature ou une démocratie, on ne peut pas gouverner uniquement par la force. Ça peut fonctionner un temps, mais arrive un moment où les peuples n’en peuvent plus et se révoltent. Il faut donc que le pouvoir s’appuie sur des bases solides pour durer sur le long terme (Max Weber, « Économie et Société », 1921).
Ainsi, les régimes autoritaires auront plus tendance à utiliser une légitimité traditionnelle, se basant sur les coutumes, les traditions immémoriales, le fait que leur autorité aurait toujours existée, qu’on a toujours fait comme ça et qu’il n’y a donc pas de raison de changer. Cette légitimité fut présente dans de nombreux régimes monarchiques dans l’Histoire, que ce soit avec la France à l’époque ou encore aujourd’hui avec l’Arabie saoudite ou dans une certaine mesure la monarchie britannique qui dure depuis plus de 4 siècle malgré les réformes.
Une autre légitimité est celle que l’on appelle « charismatique » et qui se repose sur les capacités d’un leader, légitimant son autorité par le fait qu’il soit exceptionnel et que le peuple doit être entièrement dévoué à sa cause. On retrouve cette méthode dans certains régimes autoritaires ou plus particulièrement dans les régimes totalitaires avec Adolf Hitler qui se présentait comme le Führer, le Guide de son peuple, et encore aujourd’hui avec Kim Jong-Un en Corée du Nord. L’important avec cette légitimité charismatique n’est pas forcément que les capacités hors du commun du Leader soient réelles (même si c’est plus efficace), mais simplement que les gouvernés y croient.
Enfin la dernière légitimité se base sur la loi et le droit, on est légitime, car on a gagné des élections ou parce que notre fonction est garantie par la Constitution. C’est ce qu’on appelle la légitimité légale-rationnelle qui est davantage utilisée dans les pays démocratiques.
Les régimes n’utilisent pas exclusivement une seule légitimité, non ils s’appuient sur plusieurs d’entre elles, même s’il y en a souvent une qui prédomine. L’exemple de Napoléon Ier est assez parlant ici. Il fondait sa légitimité sur l’aspect charismatique, en mettant en avant son talent militaire avec les nombreuses victoires qu’il a remportées ainsi que sur ses capacités à gérer et à réorganiser la France. L’acceptation par le Peuple français de son titre d’Empereur et de l’hérédité de celui-ci par plébiscite entérine sa légitimité légal-rationnelle ; et le caractère monarchique avec toute une série de symboles similaire à la royauté française assoit la légitimité de Napoléon dans la tradition.
Et ce sont donc tous ces types de légitimités ainsi que les autres éléments que nous avons abordés qui, en fonction de la façon dont ils seront organisés, donneront un régime politique particulier. Si on opte pour certains choix, on obtiendra une République autocratique communiste alors que si on choisit d’autres composantes, on aura une Monarchie parlementaire fédérale.
BIBLIOGRAPHIE
DE WAELE Jean-Michel & Co., « Les démocraties européennes », Éditions Armand Colin, 2015, Paris.
DELWIT Pascal, « Introduction à la science politique », Éditions de l’Université Libre de Bruxelles, 2ème édition revue et augmentée, 2015, Bruxelles.
HEYMANN-DOAT Arlette, « Les régimes politiques », Éditions La Découverte, 1998, Paris.
QUERMONNE Jean-Louis, « Les régimes politiques occidentaux », Éditions Points (5e édition), 2006, France.
SIAROFF Alan, « Comparing political regimes », University of Toronto Press, 2013, Toronto.
WEBER Max, « Économie et Société », 1921, (Disponible en ligne).
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